Nous imaginions l’Islande aride et sans aucune végétation, mais c’était sans compter sur les héroïques petites fleurs que nous avons rencontrées dans les endroits les plus insolites : silène
acaule perchée sur les orgues basaltiques de Reynir, ou poussant dans les endroits les plus déserts comme le Laki.
Silène acaule
Silene acaulis
Silène acaule
Silene acaulis
Silène acaule
Silene acaulis
Silène maritime se frayant un chemin dans la caillasse de Þorsmörk, thym arctique à Hveravellir, épilobe
arctique croissant dans l’écume des cascades, armérie maritime s’insinuant dans les anfractuosités des coulées de
lave.
Silène maritime
Silene maritima
Thym artcique
Thymnus praecox
Epilobe arctique
Epilobium latifolium
Armérie maritime
Armeria maritima
Nous avons été étonnés par la diversité des espèces rencontrées dans les sous-bois d’ Ásbyrgi : dryade à huit pétales,
myrtilles que les Islandais récolteront à l'occasion de "Berjamór", bartsie alpine,
bouleaux tortueux aux troncs torturés, saule laineux, camarine noire dont la fructification des baies profite aux oiseaux qui se gorgent avant la saison hivernale. Les graines tombées au sol ne sortiront de
leur dormance qu’au retour des jours plus longs.
Dryade à huit pétales
Dryas octopetala
Dryade à huit pétales
Dryas octopetala
Myrtilles
Vaccinium myrtillus
Bartsie alpine
Bartsia alpina
Bouleaux tortueux
Betula pubescens subspecies tortuosa
Saule laineux Salix lanata
Camarine
Empetrum nigrum
Camarine
Empetrum nigrum
Et les angéliques vertes de Vík au milieu de l’océan de
lupins, et la magnifique bartsie alpine de Skaftafell, et les délicats plumeaux de la linaigrette oscillant dans le vent, accrochant la lumière rasante. Ces
fleurs immaculées poussent dans les milieux humides des tourbières.
Angélique (jeune)
Angelica archangelica
Angélique adolescente
Angelica archangelica
Angélique adulte
Angelica archangelica
Bartsie alpine
Bartsia alpina
Linaigrettes de Scheuchzer
Eriophorum Scheuchzeri Hoppe
Et les mousses Grimmia du Laki, vert céladon, qui
enrobent d’un épais manteau vert les coulées de lave, n’ont besoin de presque rien pour subsister dans les déserts froids. Une fissure, une once de terre et elles se développent en coussinets sur
les rochers.
Mousses Grimnia
Grimnia pulvinata
Et tout là-haut, au nord, près du fjörd Kaldalón, en bordure du Drangajökull, nous avons eu la surprise de
rencontrer la dryade à huit pétales, le silène acaule, la camarine, le thym précoce, la cardamine, la
céraiste ; toutes ces fleurs poussant à ras de terre pour ne pas être la proie du vent polaire qui règne ici.
Nous y avons vu également le bouleau nain qui ici, n'est pas un arbre avec un tronc, mais une longue racine feuillue rampant au ras des cailloux, bravant le vent du
nord.
Dryade à huit pétales
Dryas octopetala
Silène acaule
Silene acaulis
Camarine
Empetrum nigrum
Thym précoce
Thymnus praecox
Cardamine
Cardaminopsis petraea
Céraiste alpine
Cerastium alpinium
Bouleau nain
Betula nana
Il y a aussi ces mousses ou algues fluorescentes, le pohlia wahlengergii, qui colonisent les
rivières du Laki et du Landmmannalaugar signalant une zone particulièrement humide.
pohlia wahlengergii
Et tous ces lichens et végétaux inconnus qui du littoral rocheux arrosé par les embruns jusqu’aux déserts représentent la seule
végétation.
Et puis le bleu des milliers lupins qui illumine les paysages désertiques.
D'AUTRES FLEURS ISLANDAISES
Vulpin des prés
Alopecurus pratensis
Vulpin des prés
Alopecurus pratensis
Lychnis des Alpes et
armérie maritime
Lychnis alpina
et
armeria maritima
Angélique adolescente
Angelica archangelica
Angélique adulte
Angelica
archangelica
Azalée alpine
Loiseleuria
procumbens
Azalée alpine
Loiseleuria
procumbens
Bartsie alpine
Bartsia
alpina
Campanule à feuilles rondes
Campanula rotundifolia
Canche alpine
et
Lychnis des Alpes
Deschampsia alpina
et
Lychnis alpina
Cardamine de Nyman
Cardamina nymanii
Cardamine des prés
Cardamine pratensis
Centaurée
Centaurea
Cranson arctique
Cochlearia arctica
Epilobe en épi
Epilobium augustifolium
Fléole des prés
Phleum pratense
Gaillet
Galium normanii
Géranium des bois
Geranium sylvaticum
Géranium des bois
Geranium
sylvaticum
Géranium des bois
Geranium
sylvaticum
Linaigrette de Scheuchzner
Euriophorum
Scheuchzeri Hoppe
Lychnis des Alpes
Lychnis Alpina
Lychnis des Alpes
Lychnis Alpina
Pavots d'Islande
Papaver nudicaule
Pavot d'Islande
Papaver nudicaule
Populage des marais
Caltha palustris
Populage des marais
Caltha palustris
Orpin rose
Rhodioma rosea
Orpin jaune
Rhodiola rosea
Silène acaule
Silene acaulis
Silène dioïque
Silene dioeca
Silène dioïque
Silene dioeca
Silène maritime
Silene maritima
Pissenlits
Taraxacum officinale
Trolle d'Europe
Trollius europaneus
Myrtilles
Vaccinium myrtillus
Saule laineux
et bouleau nain
Salix
lanata
et betula nana
Saule boréal
Salix borealis
Saule boréal femelle
Salix borealis
Saule à feuille de Philica
Salix philicifolia
Jonc
Juncus
Cytise en pleine floraison le 23 juin
Laburnum
Roquette de mer
Cakile arctica
Pourpier de mer
Honckenya peploide
Ce ne sont que quelques-unes des 470 espèces présentes sur le territoire islandais.
LES LUPINS (Lupinus nootkatensis)
De retour d'un voyage
en Alaska en 1947, un chercheur islandais a rapporté quelques graines de lupin ramassées dans les Montagnes Rocheuses. II les a plantées dans un parc
près de Reykjavik dans un champ de laves et de caillasses. Ces lupins se sont bien acclimatés en Islande, ont fait des petits et se sont répandus sur plusieurs milliers d'hectares sur tout le
territoire, menaçant toutes les nouvelles plantations d'arbres.
On peut expliquer la colonisation rapide par le système racinaire de cette légumineuse qui lui permet de ne pas manquer d'azote dans les lieux
pierreux. Ses racines sont susceptibles de solubiliser le phosphore minéral que l’on trouve à profusion dans les laves.
Le lupin a la propriété (grâce à des bactéries qui peuplent ses racines) de fixer dans le sol l'azote de l'air. La plante agit donc comme un agent fertilisant et reconstructeur des sols abîmés,
permettant à sa suite la colonisation par d'autres végétaux ...
Sur ces bases, ce sont des milliers d'hectares de lupins qui ont été semés dans de nombreuses régions semi-désertiques du pays. Les lupins ont une résistance extraordinaire aux conditions
difficiles, et une propension incroyable à s'étendre et se développer rapidement ...
On pourrait craindre, à ce rythme, que leur développement ne devienne à terme incontrôlable, mais il n'en est rien, car dans la plupart des cas, après avoir rempli leur rôle de réparateur de la
nature, les lupins disparaissent d'eux-mêmes entre 15 et 40 ans ...
La plante est cependant tellement dominante que des recherches seront encore nécessaires pour mesurer son impact réel sur la flore islandaise.
Le service des "Eaux et Forêts" islandais ne l'utilise donc qu'avec une certaine prudence, seulement dans des zones où les sols sont extrêmement endommagés et où l'expansion phénoménale de cette
plante peut être maîtrisée.
Néanmoins, les particuliers conservent la liberté de semer des lupins où bon leur semble. Des fermiers dont les terres sont en partie stériles l'ont fait dans l'espoir d'étendre leurs herbages, et rien ne le leur interdit.
Certains voient cette pratique d’un mauvais œil car le lupin n’a
jamais poussé naturellement en Islande et déjà, il a colonisé les plantes indigènes du parc de Skaftafell où son arrachage massif a commencé il y a plusieurs années.
Le service des "Eaux et Forêts" islandais envisage de mettre en place une législation plus contraignante pour contrôler les semis de lupins et - à titre plus général - l'introduction de plantes
n'appartenant pas à la flore naturelle de l'Islande.
Le surpâturage immodéré des moutons ayant érodé la terre, la plantation de lupins d’Alaska a été entreprise pour stabiliser l’érosion des sols dans certaines régions et faire du fourrage pour nourrir les ovins l’hiver.
Les lupins suscitent aussi d'autres formes d'intérêt. Certains herboristes islandais pensent que les racines de la plante contiennent des molécules permettant de stimuler les défenses immunitaires humaines. Des essais privés se seraient montrés intéressants pour limiter les effets secondaires de certaines chimiothérapies.
Entre notre premier passage en juin 2005 et notre séjour en juin 2009, nous avons constaté une grande différence.
Dans le sud, le long de la route N°1, ce n'était que sandur noir mais maintenant, les lupins ont envahi chaque centimètre carré.
Du point de vue touristique, c'est magnifique, mais du point de vue écologique, cela pose beaucoup de problèmes.
Le lupin essaime là où on n’a pas du tout besoin de lui et y prend
souvent le dessus sur les espèces locales. Il s’étale sur les versants herbeux, accapare les terrasses alluviales et les lits de rivière, il sait même envahir des sous-bois de bouleaux tortueux
au point d’étouffer toutes les plantes de petite taille. Pourquoi disparaitrait-il des milieux qu’il a lui-même rejoints, où il a réussi à évincer les plantes d’origine ? Il n’y a pas en Islande
de plantes concurrentes de la famille et de la vivacité du lupin, à apprécier une telle variété de milieux, à s’opposer à sa domination. Des campagnes d’arrachage ont montré combien il était
résistant. On trouve maintenant des tapis continus de lupins dans toutes les régions du pays, il y a longtemps que l’espèce est hors de contrôle. Les choses changent, tardivement : une loi a été
votée pour interdire son utilisation sur les plateaux centraux (au-dessus de 500 m d’altitude) ainsi que dans les zones protégées. Sa plantation n’est maintenant plus effectuée que par les
services gouvernementaux, (Landgræðsla ríkisins), alors qu’avant les agriculteurs participaient activement. Un sérieux coup de frein a été mis au programme « lupin ».
On peut rétorquer que l’Islande n’est pas un sanctuaire écologique, une réserve naturelle figée qu’il faudrait à tout prix maintenir en l’état, et qu’il est inévitable de modifier
artificiellement les milieux, surtout pour enrayer l’érosion. C’est vrai mais cela n’empêche pas de mieux choisir les pièces rapportées. D’autres plantes introduites pour stabiliser les sols
donnent satisfaction sans perturber l’équilibre de la flore existante. C’est le cas notamment de la canche de Béring ou de la fétuque rouge, chacune proche d’une espèce naturelle en Islande. Bien
sûr elles aussi se sont éparpillées dans le pays mais toujours mêlées aux autres graminées, jamais dominantes ; elles ne sont pas classées comme invasives en Islande. Des plantes « islandaises »
sont aussi semées, comme le pâturin des prés. Le cas des élymes est à part car elles ne donnent satisfaction que sur le sable ou le limon, des sols où de toute façon le lupin ne prend pas bien ;
leur usage est toujours aussi important et même en hausse. Toutes ces plantes nécessitent de l’engrais les premières années pour garantir la prise, jusqu’à 250 kg/ha, alors que le lupin n’en a
pas besoin, d’où l’engouement qu’il a suscité.
Je remercie chaleureusement Régis Despouy et Yann Pichon pour leur aide précieuse quant à la reconnaissance des végétaux.