LA FAILLE MEDIO-ATLANTIQUE
L’Islande est un domaine émergé de la dorsale médio-atlantique, longue de
15 000 km, appartenant au vaste système de chaînes volcaniques sous-marines où se forme la croûte océanique. La partie nord de la dorsale médio-Atlantique marque la limite où s’écartent les
plaques Eurasie/Amérique du Nord à environ 2 cm/an dans la direction Est-Ouest. Haute, en moyenne de 1500m, reposant sur des fonds de moins 4000m, la dorsale reste normalement
sous-marine.
En Islande, l’axe de la dorsale coïncide avec un panache mantellique, remontée de roches chaudes provenant de la base du manteau inférieur.
Ce « point chaud » augmente considérablement la production de magma. Il y a environ 20 millions d’années, l’accumulation de roches
volcaniques a fait émerger l’île et permet aujourd’hui d’observer à terre des processus d’extension classiquement sous-marins.
La zone de rift islandaise, communément dénommée zone néovolcanique ou axiale, couvre environ 26 000 km2, 1/4 de la superficie de l’île. Elle se trouve à la jonction entre la ride de Reykjanes au Sud et celle de Kolbeinsey au Nord.
La zone active du rift n’est pas linéaire, elle se dédouble en deux branches au centre de l’île : la zone
du rift d’Islande du nord et la zone du rift de Reykjanes.
Faille de l'Eldgjá
Faille de Reykjanes
Sa largeur varie de 120 à 250 km du Nord au Sud.
Plus on s’en éloigne vers l’Est ou vers l’Ouest, plus les formations volcaniques sont anciennes. On retrouve une répartition des âges en bandes parallèles à la zone axiale comme de part et
d’autre des dorsales sous-marines.
Ce mouvement d’écartement des plaques contribue à la formation graduelle de longs grabens (terrain effondré entre deux parties soulevées qui constitue un fossé tectonique) bordés de failles
normales parallèles et d’éruptions magmatiques fissurales, accompagnées de séismes.
Bien que l’écartement des plaques soit constant, d’environ 20 mm/an, le rifting n’est pas un processus
continu, il se produit par épisodes. 130 éruptions ont été décrites depuis l’an 900, soit une éruption tous les 4 à 6 ans en moyenne.
La zone de rift de Reykjanes a connu au cours de la dernière décennie plusieurs épisodes de rifting
accompagnés de nombreux séismes (les plus violents remontent à 1789), mais sans épisode éruptif. La zone de Þingvellir montre un long graben bordé par un réseau de failles normales et de blocs
basculés. Le taux d’ouverture est faible, d’environ 3 mm/an, comparé au taux de 21 mm/an mesuré plus au sud dans la péninsule de Reykjanes.
Faille de Þingvellir
La subsidence (affaissement progressif d’une zone de l’écorce terrestre) du graben est de 0,4 mm/an pour un total de 70 m, traduit une activité d’au moins 10 0000 ans.
Quelques kilomètres plus au nord, la zone géothermique de Geysir, présente de remarquables manifestations hydrothermales : sources chaudes, évents de vapeur et surtout des geysers ("jaillir"
en islandais) qui ont donné son nom à cette région.
La zone de rift d’Islande du Nord est actuellement plus active. La région du Krafla a connu une longue période d’éruption de 1975 à 1984 alors qu’elle n’avait plus connu d’activité sismique et
éruptive depuis 250 ans. Au cours de cette période se sont formés d’importants essaims de failles et de fissures ouvertes accompagnées de volcanisme fissural pour les plus importantes.
Durant cette crise éruptive, l’ouverture cumulée des nouvelles et anciennes failles et des fissures fut de l’ordre de 8 m.
Faille à Leirhnjúkur près de Reýkjahlið
trois photos du site de Namaskard
ERUPTION DU
GRÍMSVÖTN NOVEMBRE 2004
L'éruption du volcan Grímsvötn, qui a débuté le 01 Novembre 2004 vers 22 heures GMT s'est terminée le 06 Novembre 2004 au matin. Un petit panache de vapeurs se détachait du site éruptif après la fin de l'éruption.
Ce fut une éruption phréatomagmatique, sans émission de laves.
photo : raunvis.hi.is
Le magma a été expulsé sous forme de pyroclastes au niveau du site éruptif ou de téphras dans le panache éruptif.
La composition du magma est de type quartz tholéite comme lors des dernières éruptions du Grímsvötn.
La fissure éruptive a entraîné la formation d'une cavité circulaire de 1 km de diamètre dans la calotte
glaciaire du Vatnajökull; cette cavité étant entourée par des murs de glace verticaux de 100 mètres de hauteur à la fin de l'éruption. L'ensemble de la fissure éruptive, d'orientation E-W est
resté actif pendant les premiers jours de l'éruption mais seulement un évent est resté actif les 4 et 5 Novembre. Le site éruptif bien qu'étant localisé dans la caldeira du Grímsvötn, se situe à
l'extérieur du lac sous-glaciaire.
Le volume total du jokulhlaup (vidange d'une poche d'eau de fonte) qui a commencé avant l'éruption et probablement enclenché celle-ci est d'environ 0.5-0.6 km3
seulement. Le lac sous-glaciaire du Grímsvötn contenait 0.7 km3 d'eau vers la fin Octobre au début du jokulhlaup. L'épaisseur des retombées de cendres est mince hors des limites du Vatnajökull :
1 cm d'épaisseur à la limite nord du glacier et moins d'1 mm plus au nord dans des zones inhabitées.
A cause du panache éruptif qui a culminé à 13-14 kms de hauteur, le trafic aérien a été perturbé avec un large secteur interdit à la navigation.
Photo : raunvis.hi.is
Depuis août 2009, les chambres magmatiques du Grimsvötn sont très gonflées et semblent présager à une
nouvelle éruption.
L'éruption du Grímsvötn 21 au 28 mai 2011
Le samedi 21 mai 2011, à 21h20, un essaim sismique est signalé sous le Vatnajökull au niveau de Gíimsfjall. Les événements ont des magnitudes de M 2 à M 3 en moyenne et se situent à faible profondeur. Selon la presse locale, il semblerait qu'un événement éruptif soit imminent.
A 23 heures, il se confirme qu'une éruption a débuté dans le secteur du Grímsvötn sur le glacier Vatnajökull. Le panache éruptif est visible depuis plusieurs endroits du sud de l'île.
Photo Friðrik Páll Friðriksson
Le Grímsvötn est un important volcan qui se cache sous la glace du Vatnajökull. Il entre en éruption assez régulièrement. Sa dernière colère remonte à 2004. A l'époque, il a été demandé à l'aviation d'éviter la zone, mais aucune perturbation aérienne majeure n'a été observée. L'éruption de 2004 et celle d'avant, en 1998, ont duré environ une semaine.
On s'attendait à ce qu'un lahar (jokulhlaup en islandais) apparaisse dans la journée de dimanche, une fois que l'eau de fonte du glacier aurait pu se libérer de la pression exercée par ce dernier. De tels phénomènes sont fréquents quand le Grímsvötn entre en éruption et les infrastructures du sud de l'Islande sont conçues pour y faire face.
Grímsvötn: une éruption-surprise ? Pas vraiment !
Alors que l'éruption du Grímsvötn semble marquer le pas, il est intéressant de remarquer qu'elle a surpris tout le monde par sa rapidité, mais que des signes avant-coureurs avaient été observés il y a plusieurs mois déjà.
En 2010, pendant et après l'éruption de l'Eyafjöll, les pronostics allaient bon train pour savoir si le Katla voisin allait se réveiller. La plupart des observateurs se focalisaient sur les quelques impacts sismiques relevés dans le secteur. Dans le même temps, ils oubliaient de voir ce qui se passait du côté du Vatnajökull. A cette époque, les scientifiques islandais affirmaient que les essaims sismiques observés sous le Vatnajökull étaient le signe très probable d'une intrusion magmatique. L'actualité leur a donc donné raison et c'est bien le magma qui s'est accumulé il y a quelques mois qui perce la surface aujourd'hui.
Le 22 mai, la cendre retombe encore abondamment autour du volcan.
Photo Friðrik Páll Friðriksson
Photo Friðrik Páll Friðriksson Route N°1
On a d'ailleurs pu s'en rendre compte en consultant la webcam du Jokulsarlón (le superbe lagon glaciaire au sud de l'Islande). Les icebergs étaient recouverts de cendre, de même que la langue glaciaire du Vatnajökull à l'horizon.
Photo New agency Jokulsarlón
Les scientifiques pensaient que l'éruption allait continuer de manière un peu intense pendant 3 ou 4 jours, avant de décliner et de stopper définitivement.
Le tableau ci-dessous montre que la sismicité est beaucoup moins intense qu'au début de l'éruption.
A 11 heures, il semblait que l'éruption se déroulait sur le même site qu'en 2004. La lave n'a pas fait fondre une grande quantité de glace dans la mesure où le nuage de cendre s'était formé très rapidement. Il était visible de très loin, jusqu'à Reykjavík.
La cendre était beaucoup plus grossière que lors de l'éruption de l'Eyjafjallajökull l'an dernier. C'est une bonne chose car ça la empêché de se disperser sur de grandes distances. La sismicité est restée élevée sur le glacier, mais moins intense qu'au début de l'éruption.
Photo Friðrik Páll Friðriksson Cendres
A 14 heures, l'éruption du Grímsvötn se poursuivait. Aucun lahar n'avait encore été observé, mais on s'attendait à ce qu'il se produise dans les heures prochaines.
D'après le British Met Office, il était peu probable que le nuage de cendre affectât le reste de l'Europe. Comme les scientifiques le prévoyaient précédemment, les particules de lave sont relativement grosses et ne devaient donc pas provoquer des perturbations majeures dans le trafic aérien comme ce fut le cas l'an dernier. Toutefois, la plupart des aéroports islandais ont été fermés et tous les vols domestiques ont été annulés.
Selon les scientifiques islandais, l'éruption actuelle du Grímsvötn et la plus importante des 100 dernières années sur ce volcan et elle est plus forte que celle de l'Eyjafjallajökull l'an passé. Elle ressemble à l'éruption de 1873.
Le dimanche 22 au matin, le nuage de cendre montait à une hauteur de 15 - 18 km, ce qui signifie que l'éruption est plus puissante que celle de 2004 sur le même site.
Le 23 mai à 12 heures, l'éruption se poursuivait, mais la sismicité et le tremor éruptif déclinaient lentement. A cause du nuage de cendre, les vols internationaux et domestiques ont été annulés le matin en Islande, mais on pensait que le trafic reprenne dans l'après-midi.
Photo Reuters
Selon les météorologues islandais, la cendre ne devait pas atteindre l'Europe continentale. Le matin, le nuage de cendre prenait la direction du Groenland.
Les analyses des premiers échantillons de cendre révélèrent qu'elle contenait peu de substances toxiques comme le fluor. Toutefois, les particules riches en verre sont susceptibles d'irriter les muqueuses des voies respiratoires ainsi que le système digestif et les yeux des animaux. Il a été recommandé aux fermiers de garder le bétail à l'intérieur.
En fin de soirée, le nuage de cendre du Grímsvötn montait jusqu'à 5 - 9 km de hauteur. Le Met Office faisait remarquer que les vents venant du nord étaient très forts et pouvaient affecter cette hauteur. Les retombées les plus importantes ont été enregistrées dans le secteur de Kirkjubæjarklaustur. Seul le NO de l'Islande a été épargné par la cendre. L'éruption est moins intense et aucune émission de lave n'a encore été observée.
Le 24 mai au matin, le nuage de cendre atteint l'Ecosse et entraîne des perturbations au niveau des vols d'hélicoptères à destination des plateformes pétrolières en mer du Nord. Le trafic aérien en Europe continentale n'est pas encore affecté. Les aéroports islandais restent fermés. Certains vols entre Londres et l'Ecosse ont été annulés, ainsi que d'autres entre l'Ecosse et l'Irlande. Toutefois, le nuage de cendre est moins dense que l'an passé et de nouvelles techniques permettent de mieux estimer la densité de la cendre à l'intérieur du nuage. Selon les météorologues islandais, la cendre ne devait pas atteindre l'Europe continentale. Le matin, le nuage de cendre prenait la direction du Groenland.
Les analyses des premiers échantillons de cendre révélèrent qu'elle contenait peu de substances toxiques comme le fluor. Toutefois, les particules riches en verre sont susceptibles d'irriter les muqueuses des voies respiratoires ainsi que le système digestif et les yeux des animaux. Il a été recommandé aux fermiers de garder le bétail à l'intérieur.
Ce lien donne accès à une bonne vidéo du panache éruptif. On remarquera l'abondance d'éclairs provoqués par l'électricité statique due au frottement des particules de cendre. Le phénomène avait déjà été largement observé l'an dernier lors de l'éruption de l'Eyafjöll.
Photo Getty images
Photo Orvaf All Thorgelrsson
Photo Friðrik Páll Friðriksson
En fin de soirée, le nuage de cendre du Grímsvötn montait jusqu'à 5 - 9 km de hauteur. Le Met Office faisait remarquer que les vents venant du nord étaient très forts et pouvaient affecter cette hauteur. Les retombées les plus importantes ont été enregistrées dans le secteur de Kirkjubæjarklaustur.
Photo Friðrik Páll Friðriksson Reykjavík Photo AFP Vík
Seul le NO de l'Islande a été épargné par la cendre. L'éruption est moins intense et aucune émission de lave n'a encore été observée.
Pour information, la composition de la lave du Grímsvötn est essentiellement basaltique (50 - 51% de silice) avec de petits microcristaux de plagioclase. Elle est pauvre en fluor (5 - 10 mg par kg) et 10% des particules présentent une taille inférieure à 10 microns, alors que pour la cendre de l'Eyafjöll ce pourcentage était de 20%.
En conséquence, bien que le panache éruptif du Grímsvötn monte plus haut que celui de l'Eyafjöll, la grosseur supérieure de la cendre, la composition de la lave et l'indice potentiel d'explosivité laissent supposer que l'espace aérien européen ne sera que très moyennement affecté par le nuage de cendre du Grímsvötn.
En fin d'après-midi, l'éruption décline d'heure en heure. Le panache atteint maintenant une hauteur de 3 - 5 km et la production de cendre a bien baissé depuis le week-end. Un fort vent de nord entraînait la cendre vers le sud de l'Islande, mais le Met Office indiquait qu'il devrait faiblir dans la soirée.
Chaque seconde, on estime que le Grímsvötn vomit 100 tonnes de cendre, vapeur, lave et gaz volcaniques (mais certainement pas de fumée comme on a pu l'entendre sur certaines radios !). Le lundi soir, ce chiffre était de 1000 tonnes par seconde et dimanche de 10 000 - 20 000 tonnes par seconde !
La sismicité est restée faible.
Photo AFP Ramassage de lave et cendres
Suite à la décrue du nuage, les scientifiques pensaient que l'éruption devait se poursuivre pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, avant de cesser complètement. Elle aurait pu pourrait devenir une attraction touristique durant l'été.
Le 25 mai au matin, l'éruption du Grímsvötn n'est plus intense ; le panache ne monte plus qu'à environ 2 km de hauteur. Comme l'éruption décline, on pense qu'elle devrait encore durer pendant plusieurs semaines. Les scientifiques islandais pensent même qu'elle pourrait prendre fin dans les prochains jours.
A noter que durant la phase initiale de l'éruption, le Grímsvötn a produit en une journée plus de cendre que l'Eyafjöll en 40 jours l'an passé. Les scientifiques islandais estiment que cette phase initiale est la plus puissante depuis l'éruption de l'Hekla en 1947.
A midi, selon certains observateurs, l'éruption serait terminée. Seul un petit panache de vapeur s'échappait du volcan.
28 mai : le Grímsvötn semble s'être rendormi, ne reste que le panache de vapeur pour nous rappeler qu'il s'est fâché durant une petite semaine.
Source :
- Claude Grandpey, volcanologue (http://volcans.blogs-de-voyage.fr) - Iceland review
Photo Franck Bradford Agneau nouveau-né
Photos Friðrik Páll Friðriksson Nuit en plein jour
Photos Friðrik Páll Friðriksson Secouristes
L’éruption de l’Eyjafjallajökull mars à mai 2010
Photo sans trucage A. Jakobsson 4 avril 2010
Photo sans trucage L. Jackson 4 avril 2010
Alors que l’éruption de l’Eyjafjallajökull vient de se terminer, revenons sur les événements qui ont secoué le « glacier de la montagne de l’île », traduction littérale de ce mot quasiment imprononçable pour un non-Islandais !
L’éruption ne fut pas vraiment une surprise pour les volcanologues islandais qui avaient déjà enregistré des soubresauts de l’Eyjafjallajökull en avril 2009, avec des séismes à 20-25 km de profondeur sous le volcan.
Cette sismicité a été suivie d’une période de calme jusqu’à fin décembre 2009.
Elle a ensuite repris pendant les trois semaines qui ont précédé l'éruption, avec la plupart des événements à une profondeur allant de 7 à 10 km.
Le 19 mars, un essaim sismique (1) débute à l'est du cratère, entre 4 et 7 km de profondeur. L'activité migre ensuite vers l'est et vers la surface le samedi 20 mars. A 22h30, un tremor (2) légèrement plus important est détecté sur 3 stations sismiques situées à moins de 20 km du sommet du volcan. L'éruption débute entre 22h30 et 23h30 GMT au niveau du col Fimmvörðuháls séparant l'Eyjafjallajökull du volcan voisin, le Katla, qui se cache sous le glacier Mýrdalsjökull. Elle est de type fissural, comme souvent en Islande. La fracture, d’une longueur d’environ 800 mètres, émet des fontaines de lave s'élevant à plus de 200 mètres de hauteur.
Photos Ragnar Axelsson et AFP
Le 31 mars, une deuxième fracture s’ouvre à environ 800 mètres de la première. Aucun signal sismique
ne l’a annoncée, et elle surprend les très nombreux touristes venus assister au spectacle de l’éruption.
Photo Þröstur Jón Sigurðsson
Une cinquantaine d’entre eux doivent être évacués par hélicoptère.
Des fontaines de lave jaillissent de cette nouvelle fracture, donnant naissance à des coulées qui empruntent les canyons de Hvannárgil et Hrunagil. Au final, ces coulées atteindront une superficie totale d'environ 1,3 kilomètres carrés sur une épaisseur moyenne de 10 à 20 m. Le cône de scories édifié par l’éruption atteint, quant à lui, plus de 82 mètres de hauteur.
Cette première phase a émis un magma (3) très primitif, un basalte à olivine (47% de SiO2). (4)
Après une brutale et surprenante accalmie de deux jours, le volcan entre, le 13 avril, dans une deuxième phase éruptive plus violente et plus explosive. Cette fois-ci, l’éruption est sommitale, sous le glacier proprement dit. Le volcan vomit un important volume de gaz, cendres et scories (5) sous la forme d'un panache volcanique de plusieurs kilomètres de hauteur. L'éruption fracture plusieurs centaines de mètres de calotte glaciaire et provoque une fonte brutale de la glace. Les écoulements d'eau, de boue et de débris dus à cette fonte entraînent d'importantes inondations et obligent les autorités à évacuer quelque 800 personnes.
Photo AFP-Brynjar Gauti
Photo Reuters-Ingolfur Juliusson
Une zone circulaire dépourvue de glace suite à sa fonte,
d'environ 200 mètres de diamètre, ainsi qu’une nouvelle fissure de 2 km de long sont observées près du sommet du volcan.
Le fort caractère explosif est dû tout d'abord à l'interaction entre l’eau et le magma et au violent choc thermique provoqué par le contact entre la glace à zéro degré et le magma à plus de
1000°C. Cette énergie contribue à fragmenter la roche au niveau de son point d'émission, produisant des particules très fines qui sont expulsées jusqu'à 10 km
d'altitude.
Photo
AFP-Omar Oskarsson
Cette deuxième phase émet un magma plus différencié et donc plus explosif (58% de SiO2). Le
panache de cendre entraîne une très forte perturbation du
trafic aérien européen.
L'Institut des Sciences de la Terre islandais a effectué une estimation des matériaux qui ont été expulsés par le volcan dans les trois premiers jours. Au total, 140 millions de mètres cubes de
matériaux ont été éjectés. C'est 10 à 20 fois plus important que lors de la première phase éruptive du 20 mars 2010 sur le cratère Fimmvörðuháls.
Photo Reuters
On pensait que cette phase explosive accompagnée d’un volumineux panache de cendre allait être suivie d’une émission de coulées de lave. En fait, la lave ne s’échappa que modestement du volcan. Elle entraîna pendant quelques jours seulement la fonte du glacier Gígjökull.
Vers le 20 mai, l’éruption commence à perdre de son intensité. La cendre se fait des plus en plus rare dans le panache dont la blancheur trahit la présence unique de vapeur d’eau. La sismicité chute, ainsi que le niveau du tremor éruptif, signe évident que le magma ne monte plus dans les conduits éruptifs.
A l’heure où j’écris ces lignes ( 1er juin 2010), l’éruption semble terminée. La question qui se pose maintenant est de savoir si le Katla qui sommeille sous le glacier Mýrdalsjökull va se réveiller à son tour. En effet, le passé volcanique de la région a tendance à montrer que ces deux volcans ont des éruptions assez rapprochées. Sans parler de l’Hekla, plus au nord, dont certains disent qu’il a adopté un cycle éruptif décennal depuis quelque temps et pourrait bien, lui aussi, faire parler de lui.
Malheureusement, l’état actuel de la volcanologie ne permet pas de faire de prévisions. Bien malin celui qui serait capable de prédire l’avenir volcanique de l’Islande !
Cette éruption de l’Eyjafjallajökull a pu être suivie au jour le jour par les internautes grâce à plusieurs webcams installées à proximité des sites éruptifs. Les images en streaming ont permis d’assister, depuis son fauteuil, au jaillissement des fontaines de lave et au développement des volutes de cendre. D’autre part, le site Internet de l’Icelandic Meteorological Office a permis de suivre l’évolution sismique de l’éruption, ainsi que celle du tremor éruptif.
C’est grâce à tous ces éléments que j’ai pu donner quotidiennement – parfois plusieurs fois par jour – des indications sur l’évolution de l’éruption. Il faut aussi remercier le site Iceland Review Online qui a donné, lui aussi, des informations précieuses, en particulier au niveau des problèmes rencontrés par les populations du sud de l’île.
Photo Reuteurs
(1)Essaim sismique : ensemble de secousses sismiques très rapprochées.
(2)Tremor éruptif: Un tremor (mot anglais signifiant "tremblement") correspond à l'enregistrement par les sismographes des vibrations continues présentes au niveau du volcan. Ces vibrations sont provoquées par la montée du magma. Le tremor peut durer quelques minutes ou plusieurs jours. La fréquence du tremor varie le plus souvent entre 1 et 5 hertz. Il y a deux catégories de tremors: le tremor harmonique à basse fréquence et le tremor spasmodique de haute fréquence. L'étude du tremor est essentielle pour comprendre le comportement d'un volcan avant, pendant et après une éruption.
(3)Magma : roche en fusion contenant des gaz dissous. Le magma se forme à haute température et sous haute pression par fusion partielle de la croûte terrestre ou du manteau. On garde l’appellation « magma » tant que la roche en fusion est invisible. Lorsqu’elle apparaît à la surface de la terre, elle prend le nom de LAVE.
(4)SiO2 : L'oxyde de silicium (SiO2) est présent dans la plupart des roches volcaniques
La concentration en silice peut varier d'une lave à l'autre.
Une lave "pauvre" en silice (moins
de 54 %) sera une lave fluide et chaude, donnant des fontaines et des coulées importantes, les éruptions seront effusives, ne présentant que très peu de risques. Ce fut le cas lors de
l’éruption au col de Fimmvörðuháls.
Une lave riche en silice, sera une lave plus froide et visqueuse : elle ne s'épanchera pas sous forme de coulées de lave, mais sera fragmentée par des explosions au moment du dégazage. Ce fut
le cas lors de l éruption sous-glaciaire accompagnée du fameux nuage de cendre. Ces éruptions sont toujours violentes et dangereuses.
(5)Scorie volcanique : Une scorie volcanique (généralement de couleur sombre) correspond à un morceau de magma très vésiculé (empli de bulles de gaz) et donc de faible densité qui est projeté lors d'explosions volcaniques (lors d’éruptions stromboliennes par exemple).
Photo Þröstur Jón Sigurðsson
Photo AFP-Getty
Cette image est une image radar du sommet du glacier Eyjafjallajökull, on y découvre 3 cratères de 200 à 300 mètres de diamètre.
Cet article a été écrit par Claude Grandpey, professeur d’anglais à la retraite, pour la revue de l'associationFrance-Islande. Reproduit ici avec son aimable autorisation. Qu'il en soit remercié.
Passionné de volcanologie et de photographie, il parcourt le monde pour observer les volcans actifs. Il concentre son approche sur les volcans de Sicile (travaux sur la température des gaz à Vulcano et sur les émanations gazeuses sur les basses pentes de l’Etna ; étude de la corrélation entre l’activité strombolienne et la pression atmosphérique).
Vice-Président de L’Association Volcanologique Européenne (L.A.V.E.).
http://volcans.blogs-de-voyage.fr
Publications :
Mémoires volcaniques (Ed. Sequoïa) 2003
Terres de feu, voyages dans le monde des volcans (Ed. Un Autre Regard) 2004
Volcanecdotes (Ed. Un Autre Regard) 2006
LES
DERNIERS SEÏSMES
SEÏSME JEUDI 29 MAI 2008
Un tremblement de terre de magnitude 6.7 sur l'échelle de Richter a eu lieu en
Islande entre 15h30 et 16h (heure islandaise) dans les environs de Selfoss et a été ressenti jusqu'à Ísafjorður (fjords du nord-ouest).
A Selfoss plusieurs maisons ont été
endommagées, ainsi qu'un hôpital.
Mais pas de maisons effondrées, grâce aux techniques de construction anti-sismiques généralisées.
Il n'y a pas eu de blessés, seulement de nombreuses personnes choquées.
La route entre Reykjavik et Selfoss a été fermée temporairement à la circulation, de même qu'un vieux pont de la bourgade
touchée.
Il s'est produit à la veille d'une visite de la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice, mais sa visite a été maintenue.
Aux Etats-Unis, l'institut de géophysique (USGS) dit avoir enregistré une magnitude 6,1, un niveau considéré comme élevé, à 15H46 GMT, à une profondeur de 10 kilomètres.
Les médias islandais ont quant à eux fait état d'une magnitude comprise entre 6,1 et 6,7 sur l'échelle de Richter.
Selon la télévision RUV, le séisme a été ressenti à Reykjavik mais aussi dans le sud-est de l'île, à environ 300 km de l'épicentre.
Les habitants ont vécu l'épisode avec un flegme typiquement nordique, voire avec humour.
"Rien de particulier à Reykjavík. La secousse a été ressentie mais il fait beau et les gens continuent leur train-train quotidien," selon Julien un expatrié Français.
"C'était très excitant. Je suis ravie que quelque chose se soit produit sur cette île", a déclaré à l'AFP Ingibjoerg Thorisdottir, 38 ans, une habitante de Reykjavík qui a ressenti le séisme.
"Ca donne l'impression qu'on est très ivres pendant sept secondes et puis, après plus rien", a-t-elle confié par téléphone.
Le site internet du journal Morgunbladid a montré des photos d'une route fissurée, de vaisselle brisée et d'étagères et de rayons de supermarché renversés.
Selon RUV, quelques personnes se sont fait soigner pour des coupures et des blessures
superficielles.
"En comparaison avec la Chine, les dégâts matériels sont nuls. Aucune maison ne s'est effondrée mais à l'intérieur, c'est parfois endommagé", a déclaré à l'AFP Borgthor Arngrimsson, un journaliste de RUV.
Les autorités ont recommandé aux habitants de rester hors de chez eux en raison des risques de répliques, et de ne pas utiliser les lignes téléphoniques déjà encombrées.
Selon Torfi Tulinius, professeur à l'université de Reykjavík : "c'est le plus important séisme depuis celui de juin 2001 qui avait fait des "blessés très légers".
Ce séisme avait eu une magnitude de 6,5.
Selon la Protection civile, en Islande "les séismes sont essentiellement dus à l'écartement des plaques tectoniques américaine et eurasienne".
Les régions du sud et du sud-ouest, où s'est produit le séisme du 29 mai, sont les zones sismiques les plus actives.
On a constaté (source Morgunblaðið) une augmentation de l'activité géothermique dans tout le Sud-Ouest de l'Islande depuis le séisme.
"Sur le site de Geysir, le vieux geyser endormi depuis des années qui a donné son nom au
site et à tous les geysers du monde, est beaucoup plus chaud depuis jeudi et a même tiré quelques salves occasionnelles !
Quant à Strokkur, le fidèle geyser attraction principale du site, il est nettement plus puissant depuis jeudi soir !"
Dans l'usine géothermique des Hellisheiði située à une quinzaine de kilomètres, grâce à la construction aux normes anti-sismiques, le seul dégât constaté a été une lampe tombée du
bureau.
A la suite du tremblement de terre du 29 mai, une crevasse de 5 km de long s'est formée à Hveragerði.
Elle commence dans les collines de Reykjafjall au dessus de la ville, traverse l'agglomération et la route n° 1 et finit au Sud près de la ferme de Vellir. Elle est peu visible en ville, mais
dans le terrain de golf elle atteint un mètre de large !
Parallèlement, une nouvelle et importante source chaude est apparue, toujours à Hveragerði, juste au dessus de l'école nationale d'horticulture située en haut du village. Elle crache en
permanence une boue grise en ébullition.
On a cherché un nom à donner à cette nouvelle source. Gudrídur Helgadóttir, la directrice de l'école d'horticulture, a promis un beau bouquet de fleurs à celui ou celle qui proposera le
meilleur nom.
La nouvelle marmite bouillante a été baptisée Leirgerður
!
Gerður est un prénom féminin et "leir" signifie "la boue" ... "Gerður la boueuse", en quelque
sorte.
L'école nationale d'horticulture de Hveragerði, où est apparue cette nouvelle glougloute a reçu 300 propositions par mail. C'est Jörundur Gardarsson, de Bíldudalur (fjords du Nord-Ouest) qui a
remporté le concours avec "Gerður la boueuse", et qui a donc reçu le bouquet de fleurs promis.
Non loin de Leirgerður il y a un autre "blop-blop" de couleur grise appelé Skjálfti.
Et aussi un autre plutôt rouge-brun nommé Reykjamóri.
Un autre encore, d'eau bouillante pure celui-là, qui s'appelle Hrifla.
Donner des noms aux sources chaudes est une tradition ancienne en Islande. La plus fameuse d'entre-elles est bien entendu Geysir ("la jaillissante"), dont le nom est devenu un terme générique désignant tous les geysers du monde.
Activité sismique 30 mai 2009
L'Islande a connu une forte d'activité sismique 48h avant le tremblement de terre.
En cette seule journée du 30 mai, 712 secousses ont été enregistrées dont 17 d'une magnitude comprise
entre 3 et 4.9 sur l'échelle de Richter. Les secousses ont principalement eu lieu dans le sud-ouest (autour de Grindavik) et les plus fortes ont été ressenties à Reykjavik.
Le Blue Lagoon (Blue Lagon) a dû être évacué par précaution.
L'accès au site géothermique de Gunnhver, non loin de Grindavík, a été fermé (et il y était encore lors de notre passage le 24 juin 2009).
QUELQUES PIERRES QUE NOUS AVONS RAPPORTÉES
Roches volcaniques
Rhyolites
Zéolithes
Inconnues